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Grand angle
Retrouvez
l’intégralité
de l’interview de
Frédérique Even
Horellou
sur le blog
du Cnam
Les candidat
·
e
·
s à la VAE les côtoient peu et pourtant de leur décision dépend la validation ou non de
la certification sollicitée, aboutissement de plusieurs mois de travail. Issus du secteur académique
et professionnel, les membres de jury de VAE ont en effet la lourde tâche d’évaluer les aptitudes pro-
fessionnelles acquises au regard des référentiels du diplôme visé. Un rôle clé dont les pratiques se
sont institutionnalisées depuis 2002.
M
aître de conférences au Conservatoire,
Frédérique Even Horellou exerce aussi son rôle
de pédagogue en tant que membre de jury de
VAE. «
Dès que l’application de la loi de 2002 s’est profi-
lée, j’ai choisi de m’engager dans le processus. En tant
qu’enseignante au Cnam, côtoyant un public d’appre-
nants adultes, souvent forts d’une expérience profes-
sionnelle solide et qui apportent à l’établissement leur
vécu, il m’a paru logique de participer à l’accueil et l’éva-
luation des candidats à la VAE, tout en échangeant avec
eux et leurs accompagnateurs
», se souvient-elle.
Depuis, le jury national composé d’une quinzaine de
membres dont elle assure la présidence est habilité à
délivrer par cette voie des certifications de niveau III
(bac+2) à niveau I (bac+5) liées aux métiers auxquels elle
forme ses auditeurs et auditrices : management, ges-
tion, comptabilité et ressources humaines.
Une centaine de dossiers évalués par session
Les prétendant·e·s à une VAE présentent souvent des
similitudes de profil. À l’instar des «
candidats à une
certification de niveau bac+2
, [qui pour]
beaucoup ont
incontestablement acquis des compétences dans le
cadre de leur profession. Mais possédant une certifica-
tion infra-bac, ils se sont heurtés à un plafond de verre
en essayant de progresser en qualification ou de se
reconvertir
. » Sauf exception, ces candidat·e·s ne seront
pas présent·e·s lors des jurys de VAE qui se réunissent
en formation plénière trois fois par an pour évaluer et
délibérer sur l’ensemble des dossiers accompagnés
entre deux sessions. C’est en amont, lors d’un entretien
préalable, que le dossier est défendu par son auteur·e
face à une commission composée de spécialistes, pro-
fessionnels ou académiques, du domaine de la certifica-
tion concernée. «
Ce moment nous est utile à la fois pour
croiser les informations afin de les confirmer mais aussi
pour recueillir un certain nombre de nouveaux éléments
probants
», souligne Frédérique Even Horellou. Des
indices permettent en effet de déceler rapidement une
candidature décalée «
que cela soit par la structure du
dossier, le vocabulaire employé, la gestion des annexes
inexistantes ou surabondantes mais non organisées...
».
La cohérence générale de la certification demandée par
rapport au parcours de la personne est alors examinée à
la loupe. Car, «
certains commettent des erreurs d’ap-
préciation dans le choix de leur certification
», analyse
l’universitaire. Il est alors nécessaire de préparer les
candidat·e·s à accepter un probable refus de l’étendue de
la demande de validation du diplôme par le jury national.
Pour juger de cela, la parole du ou de la conseiller·ère qui
l’a accompagné·e pèsera aussi dans la balance.
Dialoguer pour réduire les échecs
De fait, les accompagnatrices et accompagnateurs VAE
jouent un rôle primordial, dans l’élaboration du dossier
qui sera examiné et servira à évaluer le ou la candidat·e.
«
La VAE est une co-construction entre le candidat, son
conseiller et ses évaluateurs
», rappelle Frédérique Even
Horellou. «
Aussi, plus le dialogue avec le conseiller VAE
intervient en amont du jury, plus les risques d’échec d’un
candidat sont faibles. Il est vrai que nous avons un
a
priori
de solidité et de robustesse sur le dossier s’il a été
suivi par un conseiller expérimenté dont nous connais-
sons le travail. Nous avons notamment pris l’habitude à
chaque jury d’inviter des conseillers en tant qu’observa-
teurs, pour qu’ils aient un regard aiguisé sur nos pra-
tiques. Nous mobilisons tous les moyens estimés
pertinents pour que le processus de VAE soit de plus en
plus sécurisé et apporte les conditions nécessaires à une
validation totale du diplôme.
»
À l’image de l’accompagnement fourni par les conseil-
lères et conseillers VAE, les premiers jurys ont peu à peu
construit leurs pratiques et critères d’évaluation, sédi-
mentant leurs façons d’agir, qui paraissent aujourd’hui
bien institutionnalisées. Le dispositif est ainsi monté en
puissance au fil du temps. Mais l’exercice a aussi influé
dans d’autres champs, permettant notamment une
régénération des pratiques pédagogiques. Aux yeux de
Frédérique Even Horellou, il a notamment permis d’enri-
chir sa lecture des publics. Un exercice gagnant.
Dans la peau d’une jurée